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Le Tramway de Vendée

 

 

                                          

     Le T.V. de Lairoux. ( Surtout pas de G. après T.V., le tacot de l’époque ne dépassait pas le 30 kmh., et la moyenne obtenue pour effectuer le parcours était juste la moitié de ce chiffre )

                Les Tramways de la Vendée furent déclarés d’utilité publique en 1897, et la ligne Luçon – L’Aiguillon – Port fut ouverte le 14 Août 1901.

                La ligne Luçon – Talmont ( 2ème réseau ) fut mise en service le 8juin 1930, c’est elle qui desservait Lairoux, le train s’arrêtait à la gare qui se trouvait à la sortie du village sur la route des Voureuils ( le bâtiment  est toujours là, transformé en maison d’habitation). La gare précédente était celle de Chasnais et la gare suivante, celle de St. Denis du Payré.

               Cette nouvelle ligne du 2ème réseau était une bifurcation de la ligne Champ Saint Père – Les Sables d’Olonne.( premier réseau 1902 ).

 

 La gare de Lairoux

                                                                   La gare de Lairoux telle qu’on peut la voir un demi-siècle après sa fermeture.

                 Quand un étranger demandait à un paysan ce que voulait dire T.V., il répondait malicieusement : « Tueur de Vaches ». En effet, le tortillard était un danger pour les ruminants quand ceux-ci divaguaient accidentellement sur la voie.

                 Il faut préciser que la voie ferrée longeait le plus souvent la route départementale sans aucune protection, et quand elle coupait cette route, le passage à niveau s’effectuait sans barrière : Il était seulement signalé par un grand coup de sifflet que le mécanicien actionnait avant de traverser la route !

                 Le centre des agglomérations étaient le plus souvent contourné, sauf Luçon et l’Aiguillon où dans les deux cas le T.V. traversait la ville sur toute sa largeur pour se rendre de la gare principale à celle du port, il se trouvait alors impliqué dans la circulation urbaine, là aussi le sifflet fonctionnait beaucoup.

                  La locomotive à vapeur était redoutée quand elle traversait la campagne au cours de l’été, surtout  pendant les périodes de sécheresse à cause des escarbilles qu’elle semait sur son passage et qui pouvaient être la cause d’un départ d’incendie.

                 Des autorails ont été aussi utilisés pour le transport des voyageurs, ne comportant pas de sifflet, ils étaient équipés d’une cloche en guise d’avertisseur.

                 Le modèle ci-dessous est de marque Renault et a été mis en service dans les années 20 après avoir été carrossé à La Roche aux ateliers T.V.

25 voyageurs pouvaient s’y asseoir et 10 pouvaient se tenir debout sur la plate-forme arrière. A l’avant une cabine pour le chauffeur et le convoyeur de la Poste  séparait ceux-ci du compartiment voyageurs.

 Le tout était propulsé à la fabuleuse vitesse de 30 Km/h par un moteur essence de 45 CV.

L’autorail Renault T.V. N° 2

                                                    

                 Si la ligne ne passait pas dans le centre de Lairoux, par contre, elle passait devant la porte des Guinaudeau quand ceux-ci s’installèrent à la Butte des Chaumes. La lenteur du convoi qui venait de gravir la Butte et l’usage immodéré du sifflet par les mécaniciens firent qu’il n’y eut pas d’accidents à déplorer. Cette ligne fut cependant la cause indirecte des premières fractures osseuses du père Galeste.

                  Alors qu’il effectuait sa tournée de laitier, en remontant dans sa charrette, la poignée dont il s’aidait pour se hisser à l’avant se détacha et il partit à la renverse sur le bas-côté de la route. Tombant sur le dos, sa tête alla heurter un rail du tramway lui provoquant une double fracture du crâne. Il fut secouru, hospitalisé, et tant que dura son séjour à l’hôpital un mouvement de solidarité unanime fit que les voisins et quelques autres habitants de Lairoux assurèrent le ramassage du lait et les travaux habituels pour le bon fonctionnement de la ferme.

                Quand le tacot venait de Chasnais, il devait se farcir la côte Des Voureuils avant d’arriver à Lairoux. Certains gamins avaient trouvé amusant de mettre des petits cailloux sur les rails pour le faire ralentir encore plus, car ce petit truc faisait patiner les roues et quelques fois obligeait le chauffeur à descendre pour les enlever. Les chenapans bondissaient alors à l’arrière du train et se faisaient transporter gratos jusqu’à la gare de Lairoux où ils sautaient du wagon un peu avant l’arrêt.

                Les petits Guinaudeau faisaient de même avec les cailloux sur les rails, mais eux c’était pour assister à leur projection par les roues de la machine.

Après avoir fait de longs alignements sur un rail avec ces cailloux prélevés sur le  ballast, ils allaient se cacher derrière le buisson qui se trouvait du même côté et se délectaient du spectacle qu’offraient les petites pierres qui partaient dans tous les sens en provoquant des étincelles ! Ils se faisaient une sorte de mini feu d’artifice.

         Hé ! les gars, si on faisait dérailler le train ? C’est cette merveilleuse idée qui sortit un beau jour de la tête de Claude en quête de spectaculaire. Il entraîna donc ses frères à mettre de plus grosses pierres sur les rails.

           Un jour ils apprirent que le train avait déraillé, peut-être qu’un wagon d’ailleurs ; les frères Guinaudeau furent persuadés que leurs agissements en étaient la cause. Conscients de la gravité de la chose, le motus et bouche cousue fut de rigueur pour les cinq frangins et ils cessèrent ce dangereux amusement à partir de ce jour.

          Pour les habitants de Lairoux, la question ne se posait pas : Si le train avait déraillé dans le bas de la descente, c’est parce qu’il devait rouler trop vite ! Les mécanicien et les chauffeurs de locomotives de T.V. avaient en général la réputation de consommer presque autant de liquide que leur machine : Un liquide de couleur rouge ou rosée qu’ils absorbaient dans le bistrot installé tout près de chaque gare, alors vous pensez, ça devait arriver !

           Il est peut-être heureux que les petits Guinaudeau aient cru qu’ils avaient été responsables de cet accident et compris que certaines bêtises n’étaient pas à faire.

                  Le 31 décembre 1949, le T.V. fut supprimé, et ce fut un peu d’animation qui disparut en même temps que l’isolement gagna la commune. Restait quand même la gare de marchandises S.N.C.F.de la Bretonnière distante de quelques kilomètres qui à cette époque  fonctionnait aussi pour les voyageurs.

                  En 1944, un train de ravitaillement allemand comprenant du matériel, des armes et des munitions avait été complètement détruit par les avions alliés et les paysans des alentours en avaient profité pour piller quelque peu la cargaison.

                Le convoi composé d’une vingtaine de wagons se trouvait dans l’attente ( probablement de la nuit ) sur une voie de garage dans la gare de La Bretonnière. Une escadrille de chasseurs-bombardiers qui survolait la ligne Nantes –Bordeaux passa au-dessus de lui et la pièce de D.C.A. placée sur le wagon de queue les alluma avec un feu aussi nourri qu’inefficace.

               Les avions firent demi-tour et larguèrent leurs bombes ; une tomba en plein sur la D.C.A. et une autre sur les wagons, puis ils mitraillèrent le convoi. Quand ils disparurent dans le ciel et que l’on entendit plus le bruit de leurs moteurs, les gens des environs vinrent constater les dégâts et emportèrent des produits expulsés des wagons éventrés.

               Le feu qui s’était déclaré prenait de plus en plus d’ampleur et les munitions entassées dans les wagons commencèrent à exploser, faisant fuirent les récupérateurs. Pendant trois jours le train brûla inondant les champs environnants de débris, d’armes, de cartouches et de matériel de toutes sorte.

               A la ferme de l’Essai Madame Renaud avait eu très peur, sa fille âgée de 14 ans gardait les vaches dans un pré à côté de la gare. Heureusement, bien inspirée, celle-ci avait pris la décision de rentrer avec ses animaux quand elle entendit les premières explosions et elle se trouva hors de portée quand les projectiles tombèrent.

                Mais l’émotion avait été grande et Madame Renaud qui était enceinte accoucha peu de temps après d’une fille : Jeanine.

Cette même Jeanine, 19 ans plus tard épousera Michel Guinaudeau.

                Chez les Guinaudeau, des couvertures, mais aussi des bandes de cartouches pour mitrailleuse lourde avaient été récupérées. Les soldats allemands passèrent dans les maisons, firent rendre ce qui avait été dérobé en menaçant de représailles. Les couvertures furent rendues, mais pas les cartouches qui furent cachées dans un faux-grenier avec quelques autres matériels, dont des pelles de chantiers.

                Quelque temps après, les cinq garnements de la famille qui avaient trouvé la cachette, ne trouvèrent rien de mieux que de jeter quelques cartouches dans le feu de la cheminée histoire de voir ce que ça ferait. Heureusement, ils ne restèrent pas auprès, ils sortirent dehors et fermèrent la porte qui se trouvait face à la cheminée. Quand les cartouches explosèrent, c’est la porte qui arrêta les éclats sauf un qui passa au travers et vint blesser Gérard au genou ; sans gravité fort heureusement ! Quant à la porte, elle fut bien amochée.

            Raymond Plissonneau, lui se brûla les doigts en percutant l’amorce d’une douille, il se garda bien de s’en plaindre, et surtout pas à son père, car il aurait reçu une correction en plus.

           En 1944, les résistants avaient fait sauter et dérailler le T.V. sur la commune de  Chasnais Il s’agissait d’un convoi spécial circulant de nuit et transportant des munitions, mais celles-ci n’explosèrent pas. Le lendemain, le village était cerné par les Allemands et sous la menace de leurs canons. Il n’y eut pas de représailles, mais les résidants de la commune avaient craint le pire pendant un moment.

            A Lairoux, certains habitants avaient récupéré des cartouches de mitrailleuses et de fusils, et dans les années qui suivirent la guerre, ils dessertirent les balles pour récupérer la poudre afin d’employer celle-ci pour fabriquer leurs cartouches de chasse ou faire éclater des souches d’arbres.

            L’explosion des cartouches fabriquées avec cette poudre ne provoquait pas beaucoup de fumée à l’inverse de la poudre noire utilisée en ces temps de pénurie et avec laquelle il fallait attendre qu’elle se soit dissipée pour voir si le gibier avait été abattu.

             Certains avaient aussi récupéré des fusils de guerre et les avaient fait transformés pour la chasse en modifiant le calibre du canon de façon à pouvoir tirer des cartouches de 9 mm.

             Raymond Plisonneau raconte que pendant ces années de guerre, les habitants de Lairoux ne mangeaient pas autant de pommes de terre qu’ils l’auraient souhaité, car les Allemands s’en réservaient l’achat et obligeaient les cultivateurs et autres récoltants à manger les topinambours destinés aux cochons.

           Les paysans roublards s’arrangeaient pour planter des rangs de patates  entre les rangs de topinambours, en évitant les bordures du champ de manière à ce que les rames  de ces derniers cachent les fanes des premières. Les Frisés étaient ainsi persuadés que les kartofens n’étaient cultivées que pour eux et n’avaient alors pas raison de sévir si ils ne trouvaient pas la quantité qu’ils demandaient. ( Si les topinambours étaient proches des pommes de terre au point de vue nutritionnel, ils étaient loin d’en avoir la saveur).

            Le jeudi, Raymond Plissonneau ainsi que les autres gamins du village étaient réquisitionnés pour aller dans les champs de patates y chasser et tuer les doryphores. Il se souvient des deux petites plaquettes de bois qui leurs étaient distribuées et avec lesquelles ils devaient écraser ces coléoptères dévoreurs de feuilles de pommes de terre.

             L’armée des tueurs de doryphores en culottes courtes était surveillée et dirigée par  Elise Begué, une demoiselle plus très jeune qui était couturière à domicile et qui passait pour être une  grenouille de bénitier, mais elle n’était pas la seule à Lairoux. à être attribuée de ce qualificatif.

            Les jeunes garçons trouvaient distrayant de chuter puis de rouler au milieu des rangées de pommes de terre pour se retrouver la tête sous les jupes de leur surveillante afin d’avoir une vue en contre-plongée des plus instructives sur les mystères féminins.

La demoiselle étonnée ou feignant de l’être,  demandait pourquoi les garçons tenaient aussi mal sur leurs jambes.

            Claude Guinaudeau a toujours affirmé que c’est en dénombrant, puis en énumérant ses nombreuses victimes qu’il avait appris à compter. Il n’a pas été le seul a bénéficier de ce genre d’exercice d’arithmétique, et, si la méthode employée pour éliminer ces insectes nuisibles n’était pas des plus efficaces, elle avait l’avantage d’initier des enfants au calcul mental, et pourquoi pas oser dire : une certaine approche des sciences naturelles et du naturisme.

 

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